vendredi 6 juin 2014

ALGOCULTURE : oui, Mais...

Un projet d’algoculture et d’élevage d’huîtres en pleine mer  à Moëlan-sur-Mer : oui, mais…

Nature du projet

Il  s’agit de mettre en place des concessions  destinées à la culture intensive d’algues (saccharina latissima ou kumbu royal)  et à l’élevage de coquillages en pleine mer à Moëlan-sur-Mer par les sociétés Algolesko et Bamejyot (1). Ce projet privé porté par M.M. Thaéron, Prat et Legorjus (dirigeant de l’entreprise Vuelto de Nantes) couvrant 300 hectares d’espace maritime dont une partie dédiée à l’ostréiculture et à la mytiliculture se trouverait à proximité des parcs à  huîtres exploités par M. Joseph Thaéron.
L’élevage d’huîtres en pleine mer (pratiqué à Oléron, par exemple) est censé réduire la mortalité du coquillage et accélérer  sa croissance. Tous les ostréiculteurs proches du site considèrent donc que la réalisation du projet (et l’apport financier qui s’y rattache) pourrait permettre de résoudre la crise provoquée par la surmortalité des huîtres juvéniles qui, sévissant dans leurs élevages depuis plusieurs années, met en péril l’existence même de leur activité.
Dans le contexte économique actuel, il serait irresponsable de  se prononcer a priori contre une initiative de cette nature susceptible de :
-          développer une activité économique dans le sud du Finistère ;
-          sortir les entreprises ostréicoles de la crise qu’elles subissent depuis de nombreuses années.
Mais, pour se forger une opinion il paraît indispensable de disposer d’éléments fiables dans les domaines de l’économie, de l’environnement comme dans ceux de la technique et de la logistique concernés par ce projet.
Malheureusement, tous ces éléments sont absents du projet et c’est bien cette absence qui crée de l’incompréhension et de la résistance jusque dans cette partie de la population naturellement bienveillante et informée des besoins de développement de l’économie en Bretagne mais consciente par ailleurs que de telles activités ne peuvent se développer aux dépens de milieux naturels déjà dégradés. L’exemple des effets pervers de l’agriculture intensive nous a instruits à cet égard et l’on doit être d’autant plus lucide que la mise en œuvre de parades et, a fortiori, de réparations paraît extrêmement plus complexe en milieu marin qu’à  terre.
Par ailleurs, nous savons que l’Union européenne impulse une action forte en direction des énergies renouvelables et du développement durable. Le projet d’Algolesko s’inscrit  probablement dans ce type de programme. Comme des subventions locales ont été attribuées aux porteurs du projet, il est fort probable que des aides européennes suivront.  Par conséquent, en tant que contribuables participant au financement des budgets publics locaux, nationaux et européens, nous considérons  que nous avons, nous aussi, un droit de regard ex ante sur la faisabilité économique de ce projet.
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(1)                Le régime de l’autorisation des exploitations de cultures marines est défini par le décret n° 83-228 du 22 mars 1983, modifié par le décret n° 2009-1349 du 29 octobre 2009 (JO du 01/11/2009). Ce dernier décret a notamment introduit de nouvelles dispositions concernant la Commission des cultures marines, l’enquête administrative et le schéma des structures d’exploitations des cultures marines.

Implantation, emprise
Les installations (filières, corps-morts) couvriraient deux zones  (environ 300 hectares) :
-          la première d’environ 1720 m de long par 1000 m de large ;
-          la seconde d’environ 1520 m de long par 1000 m de large.
Ces deux zones seraient séparées par un passage de 850 m.
À marée basse, environ 720 mètres séparent la terre du point le plus proche de l’installation. La longueur totale de la zone d’élevage des algues, incluant le passage, représente la moitié du linéaire de la côte moëlanaise (4090 m sur 8400 m) ; soit d’un point proche des Veres jusqu’à la pointe ouest de l’entrée de Merrien.

Études et  recherches dans le domaine de la culture des algues
À la requête de leur ministère de tutelle, le Conseil général de l’Environnement et du Développement durable (CGEDD) et le Conseil général de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Espaces ruraux (CGAAER) ont rendu en juillet 2012 un rapport d’expertise devant déterminer la faisabilité de mise en place d’une filière de production d’algues alimentaires en Bretagne.

En France, la recherche fondamentale concernant la culture des algues est conduite par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer)  (station de Roscoff), des laboratoires d’établissements  publics et d’universités associées. La recherche appliquée est confiée au Centre d’étude et de valorisation des algues (Ceva).

Éléments économiques
Les Français consomment chaque année environ 180 000 tonnes d’algues (alimentation, cosmétologie).  À l’échelle de la France, la culture d’algues est embryonnaire. L’Asie produit la quasi-totalité des algues de culture dans le monde.
Produire 5000 tonnes d’algues (poids frais) chaque année sur le site de Moëlan, comme à Lesconil, tel est l’objectif d’Algolesko.

S’agit-il de créer une filière de production, de transformation et de commercialisation des algues ? Il semblerait plutôt, à ce jour, que le projet ne vise qu’à produire de la matière première pour la vendre en Chine, où la production tend à diminuer, en Europe, en Russie et aux États-Unis.  Concernant le  marché chinois, d’aucuns se disent perplexes tant les écarts de prix à la production sont importants entre les deux pays.  Si elle existe, où est l’étude de marché du porteur du projet ? Les auteurs du rapport d’expertise précité préconisent  le positionnement sur le marché national et européen. A contrario, ils  suggèrent que le choix de cibler les marchés asiatiques revêtirait un caractère très aléatoire.

Quel serait le nombre d’emplois créés ? Lors d’une entrevue que nous avions sollicitée en mars dernier, M. Thaéron ne nous avait pas caché que le nombre d’emplois créés à Moëlan serait très modeste (un chauffeur et deux ou trois matelots pour armer la barge destinée à la cueillette et au transport). Depuis lors, les chiffres des emplois fluctuent au gré des réunions ou des déclarations, sans qu’il soit possible de différencier les emplois créés des emplois consolidés, ainsi que d’en connaître  le détail par site.  
Le séchage des algues sur les installations d’une exploitation d’élevage de dindes dans le village de Kerhuiten en Moëlan permettrait une diversification des activités de cette entreprise dont le propriétaire s’est vu refuser un projet d’extension de son élevage. Lors de la réunion organisée par le maire de Moëlan 12 mai 2014, il  été précisé qu’une installation normalisée de séchage d’algues coûterait de l’ordre de 10 M€.
Le déchargement des algues à Doëlan générerait des recettes, mais ces dernières ne pourraient être que modestes (taxe éventuelle sur les tonnages débarqués, redevance pour la location d’un mouillage) rapportées aux contraintes envisageables. En effet, le choix de Doëlan comme lieu de déchargement (à l’instar de Loctudy pour le site de Lesconil) ne va pas de soi, comme nous le verrons plus loin.
S’agissant de l’élevage des huîtres en pleine mer, il convient de souligner qu’aux yeux des ostréiculteurs cette solution est peut-être un ultime espoir de sauver des exploitations qui après des décennies de prospérité connaissent depuis quelques années un déclin qui ne peut laisser indifférent. On soulignera toutefois le propos de Marcel Le Pennec, professeur en océanographie biologique, maire de Moëlan,  qui considère dubitativement cette solution. En effet, il émet l’hypothèse selon laquelle l’entassement, la promiscuité dans les élevages – possiblement associés à d’autres facteurs – favoriseraient la propagation de maladies qui ravagent régulièrement les parcs. En somme, les mêmes causes produiraient les mêmes effets, quel que soit le mode d’exploitation.

Eléments environnementaux
Le Centre national de la recherche scientifique (Cnrs) et l’Ifremer n’ont pas connaissance d’études menées dans les pays où l’algoculture est développée, pour apprécier son impact en pleine eau. La production d’algues en milieu ouvert se heurte à des difficultés de maîtrise des conditions écologiques (cf. rapport d’expertise du CGEDD et du CGAAER précité).
Ce rapport met l’accent sur l’attention à porter à la prévention ou à la limitation des nombreux conflits d’usage affectant l’espace côtier. En outre, il souligne la nécessité d’inscrire cette activité nouvelle dans une démarche de développement durable ; étant entendu que ledit rapport n’est qu’un « rapport d’étape pouvant donner lieu à des études complémentaires ».
Le projet ne mentionne aucune étude d’impact. Chaque site présente fort probablement des spécificités. Aussi, semble-t-il pertinent de se poser la question de savoir si ce qui est envisageable à Lesconil est transposable à Moëlan.  
Par conséquent, une observation scientifique de l’impact des installations figurant dans le projet sur les courants, la faune et la flore sur le site même comme dans les rias ou les rivières proches, sur les effets des vents dominants et de la houle, le développement du plancton, etc. doit être un préalable indispensable à la prise de décision dans un dossier de cette nature. Comment ne pas se préoccuper  des conséquences possibles sur l’ensemble du milieu de la culture intensive d’une seule espèce d’algue ? Quelles seront les effets sur la faune et la flore de l’emploi éventuel de produits destinés à accélérer la croissance des algues ou à les protéger de certaines maladies ?

Par ailleurs, il semble inéluctable qu’en se dispersant en dehors de la zone d’élevage, cette algue, même si elle est déjà naturellement implantée en densité modérée, colonisera des zones où elle n’est pas actuellement présente, au détriment d’autres espèces. Chacun a eu l’occasion d’observer ce phénomène de colonisation en divers endroits de l’estran de notre département (moules et huîtres notamment).
Enfin, l’implantation des installations telle que décrite ci-dessus réduira fortement  l’espace dans lequel de nombreux usagers ont coutume d’exercer leurs activités (rarement pêche professionnelle, plus souvent pêche et plongée de loisir). Il n’est pas douteux que le rétrécissement de cette zone de captures provoquera  ailleurs une concentration de filets, de casiers, de palangres, etc., donc  de la surpêche en des lieux déjà très appauvris. Mais, il n’est pas exclu que l’impossibilité de pratiquer la pêche et la plongée de loisir sous les « champs » d’algues  ne favorise le développement de la ressource halieutique en protégeant les frayères et les nourricières malgré l’emprise des ancrages et l’ombrage occasionné.

Éléments techniques, logistiques
Aucune étude ne prend en compte la problématique de l’adaptation des installations portuaires et de la voirie de Doëlan à une activité de débarquement des algues par barges de 100 à 150 tonnes/jour (de mai à la mi-juillet) et leur transport sur des remorques de 25 tonnes (soit 5 à 6 allers et retours journaliers entre Doëlan et le village de Kerhuiten en Moëlan).
Il semblerait que le quai Sancéo (rive droite) ait été un temps envisagé pour le débarquement ! Le 6 mars, lors d’une entrevue sur site avec M. Thaéron et la personne chargée du transport, M. Kerhervé, dont nous avons pris l’initiative en tant que citoyens, nous n’avons eu aucune difficulté à convaincre M. Thaéron que les activités qui se déroulent régulièrement sur ce quai, ainsi que la future installation d’une aire de carénage,  ne permettent pas d’envisager d’y accueillir le déchargement de telles quantités d’algues. La configuration de la voirie constitue un écueil  supplémentaire.
Restait donc la solution d’un débarquement sur le quai Cayenne. Nous y avons accompagné les deux personnes précitées. M. Thaéron a considéré que le ressac et la houle qui se produisent fréquemment aux abords de ce quai ne seraient pas un obstacle à l’accostage de la barge. Il n’est pas certain que cela soit vrai en toute circonstance. En outre, à marée basse, la barge ne pourra accoster qu’à l’extrémité  ouest du quai Cayenne.  Enfin, l’étroitesse de la voie d’accès ainsi que la surface de la cale et du quai contraindront peut-être à des adaptations (conteneurs étanches plus petits que ceux prévus initialement, utilisation d’une partie du site de l’ex-usine comme lieu de stockage éphémère). À terme la nécessité de réaménager le quai Cayenne et ses accès pour pérenniser cette activité s’imposera.
 Le transport se ferait par la rue de Keruster (très étroite), Kergrippe, Kerjord, Langlazic, le bourg (ou Saint-Jacques) pour gagner Kervennou puis le territoire de la  commune de Moëlan.  À noter que le passage sur le pont de Doëlan (Pont du) est interdit aux  véhicules de plus de 19 tonnes.

Et maintenant ?
On ne peut qu’être consterné par la discrétion de certains élus dont le maire de Clohars, lequel déclarait il y a peu qu’il ignorait tout de ce dossier malgré la présence en mairie du 4 au 18 janvier 2014, de trois  documents consultables par le public (deux études complémentaires relatives à la demande de concessions des culture marines l’une déposée par Algolesko, l’autre par Bamejyot et une notice explicative d’Algolesko sur le projet), Il est vrai que la présence de ces documents n’a pas fait l’objet d’une large publicité. Pourquoi tant de discrétion ? Où en serait notre connaissance du dossier si nous avions attendu que les élus concernés nous informent ? Pourquoi le maire de Clohars n’a-t-il pas fait en tant qu’élu ce que nous avons fait par devoir citoyen en rencontrant M. Thaéron en mars 2014 ? Pourquoi n’a-t-il pas donné une suite favorable à la requête de l’association Doëlan-Clohars-Environnement visant à obtenir la mise en place en mairie d’un registre destiné à recueillir les doléances du public ? (Le maire de Moëlan l’a fait).
Alors qu’il était encore maire de Moëlan et président de la Cocopaq, M. Morvan était favorable à ce projet ; il le reste en sa qualité d’élu de l’opposition au conseil municipal de Moëlan. Dans le traitement de ce dossier, M. Morvan a fait preuve d’une discrétion à laquelle il ne nous avait pas habitués. Il semblerait qu’il se soit officiellement exprimé pour la première fois sur ce projet lors de la cérémonie des vœux du début 2014. C’est d’ailleurs après cette déclaration qu’une association de pêcheurs plaisanciers de Moëlan a pris l’initiative de demander la prolongation de la durée de l’enquête publique.
Si l’on se réfère au compte rendu de la réunion de l’assemblée générale de l’association des pêcheurs plaisanciers de l’Aven-Belon (Ouest-France – entreprises.fr du 5 mai 2014), le Conseil général du Finistère et M. Miossec, maire de Riec-sur-Belon et président de la Cocopaq, sont favorables sans réserve à ce projet. Voici ce qu’ils ont déclaré lors de cette réunion : « c’est un projet d’avenir, qui plus est créateur d’emplois, et les porteurs du projet ont communiqué sans rien dissimuler, en étant toujours à l’écoute ». On notera que dans le même article, M. Thaéron parle de « 65 emplois en jeu » incluant les effectifs de son exploitation ostréicole.
De la réunion qui s’est tenue à Moëlan le 26 mai (quinze participants), il ressort que diverses associations des communes concernées  sont en train de constituer un groupe de travail. Réservées sur la faisabilité du projet tel qu’il est présenté aujourd’hui, elles semblent à ce jour  généralement plus nuancées que le n’étaient par exemple l’association des amis des chemins de ronde (Acr), l’association des pêcheurs-plaisanciers et usagers du Belon (Apub), ou encore l’associaion Rivières et bocage, Belon, Brigneau, Merrien lorsqu’elles  se sont toutes exprimées auprès des autorités sur ce projet. La dernière citée a en particulier demandé la création d’un comité représentant les maires concernés par le projet (cf. articles parus dans O-F du 20 mai 2014, Le Télégramme du 26 avril et du 17 mai 2014).
 Que sortira-t-il du  groupe de travail dont la création a été évoquée le 26 mai ?
Les pêcheurs professionnels de Moëlan-sur-Mer seraient favorables à une expérimentation. Ceux de Clohars ne se sont pas exprimés  officiellement. Certains d’entre eux estiment  que les installations portuaires de Doëlan ne sont pas adaptées au débarquement des récoltes.  Nous ignorons la position du Comité départemental des pêches.

Bien que le progrès économique et l’innovation figurent parmi ses préoccupations  majeures, « Vivre-ici » ne peut concevoir que le projet d’Algolesko soit mis en œuvre tel qu’envisagé  aujourd’hui. Il s’agit en effet de veiller  à ce  que la promotion de cette filière, prometteuse pour l’économie de la Bretagne, s’inscrive dans une démarche de développement durable associant toutes les parties prenantes. À ce jour, les promoteurs du projet n’ont pas adopté une démarche susceptible d’entraîner une adhésion sociale à l’usage partagé du littoral.
« Vivre-ici » se prononce donc pour une expérimentation sur une surface réduite, selon un cahier des charges précis et contraignant pendant une durée déterminée par les autorités administratives en concertation avec les scientifiques. Tant que les résultats de l’expérimentation ne seraient pas en tous points conformes aux critères retenus, le projet ne pourrait être validé. Le maire de Moëlan semble favorable à cette alternative.
Le calendrier actuel prévoit que la Commission des cultures marines (présidée par le préfet du département) rendra un avis sur le projet à la mi-juin 2014 et que le préfet prendra une décision en septembre 2014. Le temps presse !

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Sources :
Ø  rapport d’expertise du CGEDD et du CGAAER de juillet 2012 ;
Ø  programme  « Breizh’alg » : l’algoculture, une ambition à partager ;
Ø  enquête publique ;
Ø  Rapport d’Algolesko :

-          tome   1 : déclaration au titre de l’environnement

-          tome   2 : étude d’incidences Natura 2000

-          addenda du 08/04/2013 – compatibilité du projet vis-à-vis des objectifs du SDAGE Loire-Bretagne et du SAGE Ouest Cornouaille

Ø  entretien sur site avec  M.M.Thaéron et Kerhervé le 6 mars 2014 ;
Ø  réunion publique à Moëlan le 12 mai 2014 ;
Ø  réunion à Moëlan le 26 mai 2014 (15 participants représentants diverses associations) ;
Ø  Le marin du 14 février 2014 ;
Ø  Ouest-France-entreprises.fr du 5 mai 2014 ;
Ø  Marine et Océans du 10 mai 2014 ;
Ø  portail de l’innovation en Bretagne ;
Ø  Terre-net (culture d’algues en masse) ;
Ø  agrisalon.com (article du 11 mai 2014) ;
article intitulé « les huîtres font de la place aux algues » paru dans le n° 20 de décembre 2013 de Mag 16, le magazine de la Cocopaq ;
Ø  Le Télégramme des : 9/01 ; 13/01 ; 15/01 ; 17/01 ; 18/01 ; 20/01 ; 24/04 ; 3/05 ; 10/05 ; 17/05 ; 24 et 25/05/2014.
Ø  Ouest-France des : 16/01 ; 17/01 ; 23/01 ; 5/03 ; 24/04 ; 3/05 ; 13/05 ; 19/05 ; 20/05 ; 30/05/2014.


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